Location touristique Airbnb
- MY LOCATAIRE
- 19 févr. 2021
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 févr. 2021
La Cour de cassation, dans un arrêt très attendu, confirme la validité du mécanisme de changement d'usage et de compensation pour la location meublée touristique de courte durée. Et les amendes qui vont avec. La Haute Cour donne ainsi raison à la ville de Paris.
La réglementation française applicable
A Paris et dans des trois départements de la petite couronne parisienne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne) ainsi que dans les villes de plus de 200.000 habitants, l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation (CCH) soumet à autorisation administrative préalable la location meublée touristique de courte durée à une clientèle de passage de logements destinés initialement à l'habitation (hors dispense pour la résidence principale louée dans ce cadre dans la limite annuelle de 120 jours). A Paris, cette autorisation est subordonnée à une obligation dite de « compensation ». Cette compensation consiste pour le demandeur à rendre à l’habitation des locaux qui étaient affectés au 1er janvier 1970 à un autre usage. Pour cela, le demandeur peut acheter le droit d’usage que possède un autre propriétaire de locaux qui vont être transformés en habitation. Autrement dit, la tâche administrative est ardue et le coût financier très lourd.
Bon nombre de locations touristiques à Paris se réalisent en toute illégalité eu égard aux contraintes administratives.
Les poursuites judiciaires de la Ville de Paris
C’est dans ce contexte que la Ville de Paris a assigné des propriétaires-bailleurs en justice en 2015 pour avoir loué leurs résidences secondaires sur Airbnb sans en avoir obtenu l’autorisation préalable et sans avoir respecté le principe de compensation obligatoire.
Condamnés en 2017 à des amendes de plusieurs dizaines de milliers d’euros, ces propriétaires se sont pourvus en cassation. Ils dénonçaient le caractère coercitif de la réglementation française. Ils considéraient qu’elle n’était pas conforme au droit européen en constituant une entrave à la libre prestation de services. La Cour de cassation saisit alors à son tour la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
En septembre 2020, la CJUE considéra que la réglementation française destinée à réguler les locations touristiques de type Airbnb était conforme au droit européen. Pour la CJUE, le régime français d’autorisation préalable apparaît justifié en tant qu’il poursuit un objectif de lutte contre la pénurie de logements. La justice européenne estima à ce titre que le principe de compensation mis en place par la Ville de Paris était un outil adéquat. Pour autant, la justice européenne laissa le soin à la juridiction française de s’assurer que les modalités de fixation de cette compensation étaient bien adaptées à la situation du marché locatif local et qu’elles étaient compatibles avec l’activité de loueur touristique.
La réglementation française est conforme au droit communautaire
Dans son arrêt du 18 février 2021, la Cour de cassation a considéré que les articles L. 631-7 (autorisation préalable à un changement d’usage) et L. 631-7-1 (modalités de délivrance de cette autorisation) du CCH étaient bien conformes à la Directive Européenne « Services » du 12 décembre 2006 (Cass. 3e civ., 18 fév. 2021, n° 17-26156). Et la Cour de cassation de conclure ainsi : "Ayant retenu qu’il résultait des éléments produits que le bien [...] avait fait l’objet de locations de courte durée, épisodiques, à l’usage d’une clientèle de passage sans que n’eût été sollicitée d’autorisation de changement d’usage, la cour d’appel en a déduit à bon droit, sans violer le principe de primauté du droit de l’Union européenne, que celle-ci avait enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation et encourait l’amende prévue par l’article L. 651-2 du même code".
La Cour de cassation valide les règles françaises encadrant les locations touristiques et les amendes applicables aux propriétaires contrevenants.
Les 400 affaires gelées au Tribunal judiciaire de Paris dans l'attente de cette décision vont pouvoir être instruites : les propriétaires en infraction s’exposent à des amendes pouvant aller jusqu’à 50.000 euros, soit un cumul de près de 20 millions d’euros de sanctions.
Outre l'arrêt précité, la Cour de cassation a rendu le même jour deux autres arrêts confirmant sa position à l’égard des locations touristiques de courte durée :
Par un deuxième arrêt (Cass. 3e civ., 18 février 2021, n° 19-13191), la Cour considère que la procédure de changement d'usage et de compensation s'applique dès lors qu'un bail est inférieur à une année et qu'il ne s'agit pas d’un bail étudiant ou d’un bail mobilité.
Par un troisième arrêt (Cass. 3e civ., 18 février 2021, n° 19-11462), la Cour confirme une position jurisprudentielle récente et favorable aux propriétaires à l’encontre de la Ville de Paris (Cass. 3e civ., 28 nov. 2019, n° 18-23.769 et Cass. 3e civ., 28 mai 2020, n° 18-26366). Tout d'abord, la Ville de Paris doit démontrer l'usage d'habitation d'un logement au 1er janvier 1970. Pour cela, elle s'appuie sur la déclaration H2 qui permet de recenser les constructions nouvelles et d'établir leur valeur locative cadastrale. Cependant, la Ville de Paris n'est pas toujours en possession de ces données. Ensuite, la Cour confirme que le formulaire H2 rempli postérieurement au 1er janvier 1970 par le propriétaire d’un local ne permet pas d’établir la preuve de l’usage d’habitation du bien à cette date. En l'espèce, un formulaire H2 daté de 1978 ne permet pas d'établir que le bien était à usage d'habitation au 1er janvier 1970. Cette position de la Cour de cassation pourrait s’avérer déterminante dans de nombreuses affaires dans lesquelles le formulaire H2 est postérieur à cette date.
Si la Cour de cassation entérine les règles françaises, elle rappelle également les éléments à réunir par la Ville de Paris qui devra faire preuve de grande rigueur pour condamner un propriétaire.
Cass. 3e civ., 18 février 2021, n° 17-26.156
Cass. 3e civ., 18 février 2021, n° 19-13191
Cass. 3e civ., 18 février 2021, n° 19-11462
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